dimanche 26 juin 2016

La méchanceté de l'Autre est un cadeau du quotidien

Quand on passes sa vie à faire en sorte que personne n'aie rien à nous reprocher, on ne prend aucun risque de se tromper. Certes.

On évite des moments difficiles, mais nécessaires pour grandir, et apprendre.

La vie d'adulte, c'est pas drôle. Pas tout le temps. Beaucoup de responsabilités, beaucoup de devoirs et de temps compté. Beaucoup d'attentes des autres, de la société, des amis, du patron.

Beaucoup d'attentes de soi-même aussi. Trop souvent.

En acceptant de grandir, on renonce à beaucoup de choses.

A l'illusion de la toute-puissance. A la liberté d'aller se cacher sous les jupes de sa maman. A la protection inespérée du statut de l'enfance. On renonce à être transparente. On est obligé de s'imposer.

Alors j'accepte de me tromper, tomber, me relever. J'accepte d'être jugée, parfois malmenée.

Parce qu'on dit que la vie ne fait pas de cadeau, mais en fait, chaque évènement est une leçon à prendre comme un don. Encore faut-il savoir le tourner et le retourner jusqu'à ce que l'on en comprenne le sens, sans pour autant souffrir de trop. 

Depuis le début de mon stage, j'ai l'impression que le ciel se défoule sur moi. J'aurai pu tomber sur une personne agréable, avenante ou  à minima, bien dans ses chaussures.

Mais non. Non, je crois que la vie m'a offert une épreuve de plus.

Je pourrais me plaindre, dire stop, rompre le contrat de stage dès mes 3 mois bouclés.

Mais non. Cela serait trop simple. Or toutes les épreuves sont faites pour être surmontées. Et je commence à comprendre que les défis et moi, on s'entend bien.

Oui, chaque semaine, je verse mon lot de larmes. Chaque semaine, ma kiné masse mon ventre noué par les tensions, écrase doucement les muscles de mon dos, serrés d'angoisses, tendus de pressions.  Fait craquer les côtes qui se coincent. Aperçoit même des déchirures abdominales. M'appelle la petite marathonienne tant mes quadriceps sont durs.

Mon visage reste impassible. J'encaisse, je souris, j'écoute, j'essaie de comprendre.
Comprendre cette femme qui adopte des comportements antagonistes selon la personne qu'elle a en face, et selon ce qu'elle peut en tirer pour son profit. 

Cette femme jolie, mais exigeante. Très. Trop. Ce ton mielleux du matin, se transformant en joues rougies par la colère, les yeux fuyants, lorsqu'elle me reproche mon manque d'attention.

Ce ton moqueur, lorsque j'ose poser une question. Son regard hautain. Son sourire qui s'efface en se tournant vers moi.

Ses "je sais que tu fais beaucoup Marie, tu es très agréable et tu es sérieuse". Précédant ses "j'ai l'impression que tu ne comprends rien de ce que je te dis. De toute façon moi, je partais à 21h quand j'étais stagiaire". "Non, moi je ne mange pas au self, c'est pas sain, une salade et je suis calée" (avec ses footing de 10 km juste avant). Le café bio qu'elle fait couler, pour ELLE et son collègue hipster (sous entendu de même catégorie sociale et professionnelle).

Ses "je dois te dire que je suis TRÈS en colère", après une journée où j'ai du gérer seule tout un projet pour lequel ELLE a été embauchée, répondre à des centaines de personnes en français et anglais... le téléphone dans une oreille, et les mails en même temps. "Peut-être que c'est trop te demander ..."

Tout ça c'est du détail. Le plus difficile, je crois, c'est de sentir dans le regard de l'autre et ses mots à quel point il nous méprise. A quel point tous les efforts déployés seront toujours insuffisants.

Le plus compliqué, c'est partir le matin en se demandant si ce sera une bonne journée, ou si je terminerai, le visage crispé par la tristesse et la colère, le cœur serré d'émotions. 


C'est blessant. Je suis sensible. Trop sensible. Je refoule mes larmes. Je serre la gorge. J'encaisse.

Puis, j'ai commencé à observer cette femme. Cette femme qui ne lâche pas prise. Cette femme persévérante et exigeante avec elle-même. Cette femme qui ne s'autorise aucun écart, aucun faux pas. Jamais un mot plus haut que l'autre.

Je réalise que je ne la connais pas. Qui est-elle ? Au fond, elle ne dit rien. Ne laisse rien paraître, rien sortir.

Alors, j'ai commencé à comprendre. Deviner un manque de confiance en elle immense. Un doute permanent sur le mots qu'elle a le droit de dire, et ceux qu'elle brûle de prononcer. Sur ses regards inquiets devant les biscuits qui lui tendent les bras, qu'elle préfère refourguer aux collègues pour les regarder manger.

J'ai vu le doute, la tension dans son corps. L'hésitation dans sa voix. Cette fausse allure de supériorité, cette image de force et de perfection qu'elle passe son temps à entretenir.

Alors, j'ai commencé à avoir pitié. A la regarder avec compassion. Et tendre l'autre joue lorsque je prenais une claque de plus.

Ayez pitié des gens qui sont méchants. Soyez compatissants. Car dans l'histoire, ce sont eux qui sont enfermés dans une cage, sans oser en sortir, excluant l'autre.  Excluant la vie.

Je n'ai souvent pas les mots, alors j'écris. Elle a reçu un long mail de ma part. Elle lira que la sensibilité n'est pas toujours visible, mais que ses mots ne blessent pas moins. Elle entendra que malgré tout, je continuerai à faire de mon mieux et tâcher de m'améliorer afin de me tromper moins souvent. Elle entendra aussi les mots "communication", "exigence" et "perfectionnisme". 

Elle m'aurait seulement répondu par un "merci, bonne journée".

La balle est dans son camp. Je suis blessée, mais je prends la douleur de mon ventre, et je la jette par écrit. Je lui envoie dans les bras, elle en fera ce qu'elle voudra, ou pourra.

Je n'ai pas à supporter la douleur des autres. Je n'ai pas à me rendre malade parce que la vie me met un obstacle en travers de la route.

Je prends le problème, je le regarde, le décortique. Je ne m'énerve plus. Je pleurerais sûrement encore un peu, mais ce n'est pas grave. Au final, je saurais peut être avoir moins mal, et laisser glisser les choses.

Je découperai autant de pansements qu'il faudra, jusqu'à ce que je cicatrise et comprenne comment bien marcher. Et peut-être un jour, marcher accompagnée.

Et si quelqu'un me fait trébucher, ce n'est pas grave. Je me relèverai, en souriant, et je repartirai. 







samedi 25 juin 2016

Sans prétentions ... Tarte rustique aux tomates anciennes, saveurs d'Italie

Sans prétentions. 

Je ne veux pas tricher avec moi même. 

Je ne veux plus m'obliger à être quelqu'un que je ne reconnais pas. 

Je veux du vrai, du sensible, du prudent, du courage. 

Je veux découvrir, goûter, sentir, déguster, sourire, lever les yeux, rougir, pleurer.

Je veux danser, nager, escalader, courir.

Je veux dormir, vibrer, caresser, serrer. 

Je veux ne plus avoir peur, 

Avoir confiance et me laisser faire, rien qu'un peu, rien qu'un peu plus encore ...



L'été est là ... 

Pour 3 personnes en plat, pour accompagner d'une jolie salade craquante, tomates fraîches & feuilles de basillic :

-180g de farine (moitié semi-complète, moitié épeautre)
-Herbes de Provence, sel, poivre
-40g de margarine (ou d'huile d'olive)
-Eau

-Quelques tomates anciennes, celles que tu as choisi pour ce qu'elles sont
-Du caviar de tomates ou Pesto Rosso
-200g de Burrata


Mélanger la farine et l'assaisonnement. Ajouter la margarine, et de l'eau petit à petit, jusqu'à former une boule de pâte. Réserver en frais.

Couper les tomates en tranches ou lamelles.

Étaler la pâte sur un papier sulfurisé, disposer dans un moule à tarte.
Tartiner de Pesto Rosso, ajouter les tomates, puis la Burrata en morceaux.
Poivrer, saler et parsemer d'herbe de Provence.

Enfourner 35 minutes à 180°. Odeurs de Burrata fondue, de Provence et de bruits de cigales...

Elle ne ment pas cette tarte. Elle n'est pas prétentieuse. Elle ne s'invente pas des histoires. Je crois que c'est une tarte honnête, parce qu'elle est simple.


samedi 18 juin 2016

Je suis un tout.

De longues semaines sans prendre le temps de poser des mots.

De longues semaines happée par le rythme effréné de la vie, qui avance.

Mais peuplées de hauts, assombries par des bas.

Il s'est passé beaucoup de choses, en réalité. Des choses qui m'ont fait me poser de nombreuses questions et m'ont aussi permis de réaliser le chemin parcouru. 

Un grande fatigue m'a envahit. De la lassitude aussi. C'est arrivé un matin, en fin de semaine, épuisée des trajets maison-métro-boulot-métro-maison, qui mangent le peu de temps que j'ai pour moi.

J'avais ouvert une nouvelle voie. Voie de l'ouverture à l'autre. Chose que je craignais tant. 



Or, comme je l'ai appris, et comme j'en avais déjà parlé, la peur est un moteur. La peur est un indice qui montre quels sont nos points faibles. Dans mon cas, je crois bien que 99% de mes craintes sont  ... Futiles et infondées. 

Mais néanmoins très accaparantes.

Je me plaignais de la solitude. Et c'est sûr, ce n'est pas dans le métro, ni entre deux rayons du Carrefour que l'on trouve l'amitié ou autre. A moins d'être particulièrement insistante auprès du même caissier/chauffeur/vendeur à chaque passage ... 

Pour la première fois de ma courte existence je me suis lancée dans une expérience ... Nouvelle.

Que je trouvais si ahurissante jusqu'alors, mais je ne jugeais pas les personnes qui en étaient habitués.

Un site internet. Un site oui. Pour rencontrer. Pour trouver. Pour échanger. 

Whaou. Ok, je dis le mot. Un. Site. De. Rencontre.


Moi, Marie, presque 22 étés au compteur, de longues années de craintes des hommes ? Moi Marie ? La timide, la réservée ? Celle qui aime finalement tant parler, rencontrer, mais qui construit une muraille de Chine autour de son âme pour éviter d'être blessée ? Quitte à rester ... Seule ?


De toute façon, je n'avais rien à perdre. 


De toute façon, c'est juste une expérience de plus. Je jugerai par moi-même. 

Se définir, se présenter, et que dois-je dire ou ne pas dire de moi ? Qu'est-ce qui est vrai, au fond ? Est-ce que tous ces gens sur le monde de l'internet trichent ? Est-ce que ces gens cherchent "un coup d'un soir" ? Est-ce que ces gens sont des fous-violeurs-narcissiques-pervers-intellos-geeks ?

Et moi, je suis qui pour oser juger ?

Est-ce que l'on va me parler si je semble trop timide ? Est-ce qu'il faut être avantageuse dans sa description ? Quelle photo mettre ? Comment être vraie sans faire peur ? Est-ce que je fais peur ? Est-ce que j'ai peur ?

Bref. Finalement, oser être en échange et en relation avec l'autre m'a vraiment permis, d'abord de me demander qui j'étais. 

Et finalement, oui, j'ai "rencontré", échangé. On m'a dit "enchanté". On m'a posé des questions, banales. On m'en a posé d'autres, très étranges ("est-ce que tu es fétichiste des pieds ?") (hummm. Comment dire ?!!) . On m'a affirmé que j'étais "très charmante mademoiselle t'sais".

Quand les phrases n'étaient pas impolies, elles pouvaient être intéressantes, ou truffées de fautes (et là, j'ai beau tenter de ne pas juger, je n'arrive même plus à lire)

JE NE JUGE PAS. Qui serais-je pour juger, d'abord ? Personne.

Alors j'ai continué. Et on m'a posé cette question. Bizarre. "Est-ce que tu es heureuse?"

Bim. Touchée. Coulée.

Heureuse. Comme ... Bonheur ? En bonne santé ? Aimée et aimante ? Joyeuse ? 

Oui je suis optimiste. Oui je cherche le bleu là où c'est noir.

Oui je cherche la lumière là où il y a de l'ombre. Mais car je n'ai pas le choix. Nous n'avons pas le choix. C'est si simple de se laisser enfoncer par les soucis. C'est si simple de se plaindre. Il y aura toujours mieux mais il y aura toujours et certainement bien pire.


C'est difficile, d'être heureux. Et pourtant inné.

Voilà comment, ce matin là, je me suis retrouvée blasée. Parce que en toute honnêteté, non je ne suis pas pleinement heureuse.

Non, mon stage ne me passionne pas. Je n'ai pas le ventre qui fait des papillons d'amour. Je n'ai personne qui m'attend le soir chez moi. 

Je suis encore et toujours envahie par ce symptôme, bien qu'il s'estompe peu à peu.

Oui, je reste fragile, je reste sur la défensive, comme un oiseau tombé trop tôt du nid.

Non, je ne suis pas ultra-confiante en l'avenir car j'ai peur de ne pas trouver mon chemin...

Mais si je me retourne, alors je vois les kilomètres et les avancées incroyables que j'ai fait. 

Je me revois arrivant à bout de force par ce train, soulagée de tenir encore un peu debout. Plus que quelques heures à attendre, plus qu'un peu de temps avant d'être enfin prise au secours, avant de recevoir la bouée qui m'empêcherait de couler, et mourir. 

Je me rappelle ces premières nuits, ces premières semaines à la clinique, d'insomnie totale, de faim incroyable, sans fin, sans fond. 

Je me souviens de ces repas normaux qui étaient gigantesques pour mon pauvre corps affaibli, complètement ravagé par la maigreur.

Je me remémore, ces nuits passées à craindre que mon cœur ne lâche durant la nuit. 

Et surtout, de cette honte, de cette haine infinie envers moi-même pour avoir osé me détruire à ce point. Ce manque de respect immense pour la vie. 


Ce foie qui se tordait de douleur pour gérer ces quantités de nutriments qu'il n'avait pas vu depuis des mois.

Ces lundis passés sur une balance, qui indiquait que la vie revenait dans ce corps.

Toutes ces larmes versées, tous ces pleurs lâchés, toutes ces confessions sur le divan, devant cet homme qui m'avait cernée.

Je me retourne et je vois tout ça. Cela ne signifie pas que je suis heureuse aujourd'hui. Mais que j'ai accepté de me battre pour l'être. 

Que j'ai intégré l'idée que si je voulais vivre, alors je devrais apprendre à aimer celle que j'ai été, celle que je suis et celle que je deviens.

De façon illimitée et sans condition.

Que la première joie, c'était de se sentir d'abord bien avec soi. De saisir chaque minute comme une opportunité de danser, rire, manger, crier, voir, sentir, palpiter.

Et peut-être même tout cela avec quelqu'un, un jour. 

Alors, sur ce site, finalement, j'ai compris que c'était déjà un début de quelque chose, un pas de curiosité vers l'autre que je n'avais été capable de faire que parce que je commençais à être aussi curieuse envers moi-même, et surtout, un peu plus bienveillante.


Tu es tout, et c'est déjà immense.